Histoire

AthénaL’histoire de Curis-au-Mont-d’Or, dont l’étymologie demeure controversée, débute par la découverte d’os de mammouths exhumés de la Gorge d’Enfer. «Ce sont les plus vieux Curissois connus» (-14 000 ans), écrit G.Pérouse, enfant et historien du pays. Des silex du Paléolithique et des hachettes de pierre polie témoignent d’une occupation préhistorique du fertile plateau des Avoraux. C’est ici que furent découverts en 1862,  de nombreux tombeaux gallo-romains, une tête casquée en marbre ainsi que la base d’une puissante colonne antique, souvenir d’un édifice conséquent. Si l’on emprunte le chemin du Chabut, on peut croiser le canal de l’aqueduc qui, venu de Poleymieux, apparaît nettement dans le talus, en coupe avec sa voûte.

La plus ancienne mention du village apparaît dans la charte de Dénombrement des possessions de l’Église métropolitaine de Lyon en 984 qui cite l’église de « Curisio» et mentionne une église, la vénérable église Saint-Claude, reconvertie au XIXème siècle en habitation.
C’est alors qu’émerge le château, érigé au cœur d’une châtellenie foncière. Dépendant de celui de Saint-Germain, le comte y reçoit les hommages de ses vassaux détenant un fief, contre une rétribution. Le chevalier G. de Marchamp, co-seigneur de Poleymieux, reconnaît ainsi en 1209 «tenir en fief… toutes ses possessions dans la villa de Curis depuis l’eau (la naissance du Thou) jusqu’à Saint-Germain». En 1213, elles sont cédées à G. de Collonges, chanoine du chapitre Saint-Jean. A la fin du siècle et ce jusqu’au XVIIème siècle, le château et son domaine entrent dans la jouissance d’une des plus illustres familles du Lyonnais, les d’Albon*.

Pour nourrir une population croissante, il faut alors défricher (en témoigne le chemin des Essarts), gérer «en commun» les prés si précieux des bords de Saône (les Condamines), domestiquer et se répartir l’eau, sachant que les premiers moulins, particulièrement onéreux, sont des équipements seigneuriaux. S’esquissent alors trois gros noyaux d’urbanisation : le principal autour de l’ancienne église, sorte de hameau de Saint-Germain, un autre le long de la route d’Albigny à la Trolanderie, un dernier au Pontet. Là sont embarquées les pierres extraites des carrières exploitées par les d’Albon. Ces dernières sont notamment employées par J. de Beaujeu pour achever la cathédrale, et l’une d’entre elles est louée en 1390 par le consulat lyonnais pour remplacer les arches du pont du Rhône, jusqu’ici en bois…

Une fois enrayée la terrible peste noire comme l’insécurité provoquée par les routiers de la guerre de Cent Ans, la prospérité revient et les Lyonnais se risquent à investir à la campagne. Le Vaillant de 1388 (livre de la taille payée par les bourgeois) enregistre ainsi, en 1388, 8 tenanciers pour 21 biens, une forte proportion pour ce petit territoire. Des secteurs entiers sont plantés en vignes, comme le «vignoblio de Escleyvon» au-dessus de la ferme de la Gayette, signalé sur un terrier du XVème siècle.

TambourDès 1594, les premiers registres paroissiaux transcrivent les baptêmes d’une bonne trentaine de famille de laboureurs, paysans-propriétaires à la base de la population curissoise. Le vicaire organise alors la vie paroissiale avec ses fêtes et confréries pieuses tandis que le châtelain, juriste nommé par le seigneur, administre les affaires et délits courants. En 1642, coup de théâtre au château : les d’Albon abandonnent le berceau de la dynastie au profit de nouveaux venus sur la scène lyonnaise, les Neuville de Villeroy*. Camille, abbé d’Ainay, achète la seigneurie de Curis afin de constituer son marquisat de Vimy qu’il rebaptise Neuville. Il la revend trois ans plus tard à L. de la Veuhe, issu d’une famille de marchands foréziens et tenant de son père la charge de trésorier de France (percepteur de la taille), une fonction d’ailleurs exercée par la plupart des seigneurs qui se succèdent au château jusqu’à la Révolution…

Le village, jusqu’ici tourné vers Saint-Germain au Nord, poursuit son développement du côté d’Albigny et de Neuville, nouveau centre d’attraction où Camille Neuville de Villeroy crée plusieurs manufactures. Une école est ouverte dès 1670, tandis que se fixent ces grosses maisons carrées et régulières, propriétés de bourgeois ou de vignerons aisés.

En 1789, le bourg devient autonome et l’on y établit un curé puis la première municipalité (1791). Les Curissois soutiennent ensuite les Lyonnais révoltés contre la Convention et J.L. Beuf, le dernier seigneur et maire, est arrêté et fusillé. Lui succède son fils L. Antoine.

Sous l’Empire, la prospérité revenue, on se soucie de la distribution de l’eau mais surtout de l’amélioration des chemins, péniblement réalisée à coups de subventions. Pour répondre à l’augmentation de la population, il est construit une nouvelle église sur l’ancienne place du plâtre, c’est à ce moment qu’est crée une nouvelle place (de la fontaine). Les activités principales de cette époque sont l’agriculture, la viticulture et l’élevage des chèvres en stabulation. Il y avait en 1820 plus de 900 chèvres pour une population d’environ 330 habitants. Le bourgElles étaient nourries avec du chou et des feuilles de vigne fermentées, produisant un fromage de goût particulier. Puis en 1831, la construction du premier pont de Neuville désenclave la commune, bientôt traversée par le chemin de fer en 1855. Parallèlement, l’extraction de la pierre est réactivée par les grands travaux lyonnais…
Mais, à la fin du siècle, celle-ci cesse peu à peu tandis que le phylloxéra attaque les vignes. Ainsi succombe l’économie traditionnelle et le reboisement des collines dessine le paysage actuel… Passée la guerre de 1914, pendant laquelle les femmes s’ingénient encore à faire paître quelques chèvres, Curis s’achemine peu à peu vers la banlieue résidentielle…
L’exploitation des carrières cesse dans les années 50.

A la Trolanderie, la mairie-école (construite dans les années 1950) est agrandie en 1995 tandis que le projet «centre-village», pour remplacer la dernière épicerie, est à l’origine de la construction d’une halle commerciale, création rustique de l’architecte C. Miguet (1999).

* Albon (famille d’), originaire du Dauphiné, a fourni de nombreux vassaux aux abbayes de l’Ile Barbe et de Savigny, 23 chanoines de Saint-Jean et des gouverneurs à Lyon. André, pratiquant la banque en 1265, acquiert ensuite le petit fief de Curis et joue, comme ses trois fils, un grand rôle dans l’émancipation de la ville et sa réunion au Royaume./

* Neuville de Villeroy (famille de), marchands de poissons venus à Paris et qui, gravitant dans l’entourage royal, accédèrent à la noblesse au XVIème siècle grâce à des charges publiques. Charles, épousant la fille du gouverneur du Lyonnais, hérite de cette fonction qu’il transmet à son fils Nicolas, lequel l’abandonne à son frère Camille. Cumulant bientôt pouvoir politique et religieux en tant qu’archevêque, ce dernier devint selon la formule de Saint-Simon, «le seul roi de Lyon, le prévôt n’étant plus que son vice-roi».